Poésie, photos, musiques et partage
Peintre japonaise.
De treize ans cadette de Uemura Shōen, Ikeda Shōen (née Sakakibara, 1888-1917) fait partie de la génération éduquée dans les écoles pour jeunes filles – ce qui constitue une différence de taille avec le parcours de Uemura Shōen. Issue d’une famille aisée de Tokyo, avec un père entrepreneur et une mère qui pratiquait le yōga en amatrice, Ikeda affirma dans un article intitulé « Ce que je suis aujourd’hui, je le dois à mon maître » (Fujin Gahō, no 51, janvier 1911) qu’elle avait pris des cours auprès de Mizuno Toshikata (1866-1908) à partir de 1901, mais qu’elle devait à côté « continuer à s’exercer au koto (cithare japonaise), à la cérémonie du thé ou à l’art floral » : autant de disciplines qui relevaient à l’ère Edo de la culture générale pour les hommes, mais qui, avec l’ère Meiji, devinrent des activités culturelles que toute jeune fille de bonne famille se devait de maîtriser. Ikeda avait toujours aimé dessiner : « Petite fille, je regardais les illustrations dans les revues et les journaux et il m’arrivait de les recopier », se souvint-elle. De nouveau, on voit que, malgré la différence d’âge avec Uemura, c’est aussi en s’inspirant d’estampes ou d’illustrations dans la presse qu’elle se mit à reproduire la figure humaine. Or son père, entrepreneur disciple de Fukuzawa Yukichi, lisait certainement le Jiji Shimpô, quotidien fondé par ce dernier, si bien qu’il est fort probable qu’Ikeda ait pu admirer les portraits lithographiés de femmes de Masako Okamura (1858-1936), livrés en supplément du journal.
Si Ikeda prit pour maître un peintre de nihonga alors que sa mère pratiquait le yōga, c’est sans doute parce que Mizuno était connu pour ses portraits. Ikeda Terukata (1883-1921), son futur époux, ou Kaburagi Kiyokata (1878-1972), formé également dans l’atelier de Mizuno, devinrent eux aussi des peintres de bijinga.
Monomōde [Sortie au temple, 1908], œuvre primée au premier salon Bunten, lança la carrière d’Ikeda Shōen. Dans un article intitulé « La talentueuse Mademoiselle Sakakibara Shōen » publié en mars 1908 dans la revue Fujin Gahō, Sawada Bushō signa une critique des plus élogieuses : « Quand on cherche de jeunes artistes qui sortent clairement du lot, on ne saurait ignorer Mlle Sakakibara Shōen. » Le journaliste poursuit en citant la jeune femme : « Toute sa vie, Maître Mizuno a répété que représenter la figure humaine, ce n’était pas dessiner des poupées. Dans la peinture, l’âme et la grâce sont essentielles, il ne faut jamais l’oublier » – des propos qui témoignent d’une volonté de travailler sur l’intériorité de ses personnages. Grâce aux salons et aux expositions, Ikeda gagna progressivement en notoriété, marchant fièrement dans les pas de son aînée Uemura.