Poésie, photos, musiques et partage
Tu m'as inventée. Celle que tu imagines
N'existe pas, ne peut exister nulle part.
Chez les médecins, paas de remède; pas de réconfort chez les poètes.
Cette ombre, ce fantôme jour et nuit te persécute.
Notre rencontre eut lieu en une année invraissemblable.
Les forces du monde étaient à bout.
Tout portait le deuil. Tout déclinait, malade
Rien de nouveau, sinon des tombes.
Plus de lumière. Flots de la Néva, noirs comme du goudron.
Nuit, tout autour, compacte, comme un mur.
C'est alors que ta voix m'a défiée.
Ce que je faisais, je ne le comprenais pas encore.
Tu es venu vers moi, comme conduit par une étoile,
Tu foulais aux pieds l'automne tragique,
Tu es entré dans la maison à jamais déserte,
D'où avait fui le vol des poèmes brûlés.
(1956)
Anna Akhmatova